J'ai vécu un moment de tension important lors d'une des dernières formations que j'ai animée. Ils étaient 18 participants, des profils essentiellement commerciaux, âgés, en moyenne, d'une trentaine d'années. Appartenant tous à la même équipe.
Le sujet qui nous réunissait : la communication inter-personnelle sur 3 jours.
Premier jour. J'ai choisi mon plus beau jeu de cartes pour les présentations de chacun. Il s'agit d'un jeu "Eureka" que je trouve magnifique (que vous pouvez trouver chez GIMCA). Des grandes cartes, avec de belles couleurs et de belles photos. Et je demande à chacun de se présenter au travers de ces cartes.
Le premier qui prend la parole fait le clown. Le deuxième suit le même chemin… et là je me dis : "Christèle, intervient sinon c'est foutu".
Alors calmement, je me lève :
– "J'entends qu'il peut-être difficile de parler de soi ainsi. De partager autrement, différemment, de ce que vous avez l'habitude de faire. Je vous demande de vous présenter au travers de ces cartes, vous, en quelques mots. Ce que vous avez envie de partager avec le groupe. Je vous remercie.
… Silence….
La participante suivante rentre dans le jeu, le reste du groupe aussi. Ouf !….
Et puis je continue avec le MBTI (Myers Brigg Typ Indicator). Un outil de connaissance de soi construit sur les travaux de C. Jung (lire "Ma rencontre avec le MBTI").
Je sens toujours la gêne de certains, l'air détaché d'autres, et les questions visant à remettre en question la pertinence de l'outil sont multiples. Mais cela arrive….
Et pourtant cette fois-ci est différente des autres. Les bavardages sont incessants, imaginez à 18 ce que cela peut-être ! J'ai l'impression d'être dans une cour de récréation et je n'ai pas envie de jouer à la maîtresse.
Je poursuis, et je sens progressivement une tension monter en moi. Je suis fatiguée, j'ai envie de rentrer chez moi. C'est le 4ème jour de formation que j'anime de suite (ce que je ne fais jamais d'habitude…). Alors je me dis que cela vient peut-être aussi de moi….
Je ne peux pas continuer ainsi. J'ai envie de m'en aller, de claquer la porte, et de tous les envoyer se promener. Je respire tranquillement, doucement. Je me tais.
Et d'un ton nettement en dessous du leur, je commence :
– "J'ai une demande à vous faire".
Silence. Le groupe se tait et m'écoute.
– "Nous sommes 19. Vous êtes 18 et je suis seule face à vous. J'ai besoin de vous pour vous accompagner dans le cadre de cette formation. J'ai besoin de calme. C'est très inconfortable pour moi et désagréable de travailler ainsi dans le bruit et la non-écoute. Je vous demande de partager vos discussions en aparté avec l'ensemble du groupe, une à la fois, si elles concernent le sujet qui est le notre. Sinon je vous invite à profiter des pauses pour poursuivre. C'est important pour moi, pour le groupe et le bon déroulement de ces 3 jours. Êtes-vous d'accord ?"
– "Oui" répondent-ils, tous ensemble.
– "Je vous remercie."
Je respire... Et je poursuis dans une ambiance plus calme, qui se détend progressivement. Les masques tombent, les langues se délient avec davantage d'authenticité.
Ces 3 jours restent une première dans ce genre.
Respirer. Écouter mon besoin. Respirer…. Et demander.
Je vous invite aussi à lire "Comment obtenir ce qu'on demande ?" par Isabelle Harlé.
Comment faites-vous vos demandes ?
Waouh Christèle, bravo ! Et re-bravo d’avoir réussi à dire ton besoin de cette manière. C’est ce que j’essaye (et j’insiste sur le « essaye ») de faire : exprimer ma demande à partir de mon besoin. Alors oui ça prend plus de temps (me recentrer), ça coupe souvent la spontanéité (mais ça équivaut à tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler ce qui est parfois plus judicieux). C’est une autre façon de communiquer, mais qui apporte des résultats win-win. à très bientôt. anna
Bonjour Christèle,
Votre note m’a beaucoup touché car je me suis rendu compte que pendant des années je n’ai pas su faire entendre mes besoins.
Votre façon de les formuler m’a beaucoup appris et je vais tenter de la reproduire.
Bravo encore et merci
bravo Christèle pour cette trés belle démonstration de communication interpersonnelle réussie!et merci à toi de nous l’avoir fait partager.
Laurence
Chère Nora,
Pour « faire entendre ses besoins », faut-il encore soi-même les entendre ! Sur ce chemin de l’assertivité, ce qui me semble le plus difficile c’est déjà d’être en mesure d’écouter ses besoins, de les identifier pour ensuite les nommer…. Un livre qui m’a aussi aidé : « Cessez d’être gentil,soyez vrai » ! de Thomas D’Ansembourg. Je vous remercie Nora et je vous souhaite une belle journée 🙂
Chère Anna,
Dans certains cas la spontanéité a du bon effectivement et elle me va bien , elle est ma zone de confort. Dans des situations tendues comme celle-ci, ma spontanéité aurait eu un effet contre-productif… Comme tu peux l’imaginer :)… Effectivement cela implique de prendre le temps de se poser, d’écouter ce qui se joue là pour être en mesure d’en faire quelque chose de positif en lien avec le contexte et l’objectif. Et 3 questions qui m’aident toujours : Qui suis-je face à toi ? Qui es-tu face à moi ? et quel est notre objectif ? Merci Anna, je te souhaite excellent Week-end !
Chère Laurence bienvenue sur ce blog et mille mercis, je suis touchée…;)Christèle
Bonjour Christèle,
je découvre avec beaucoup de bonheur votre blog, grâce à André de Chateauvieux.
J’aime vos partages clairs et que je sens authentique. Dans le présent texte, vous nous montrez un bel exemple d’application du processus de Communication Non Violente. La clé est bien d’être à l’écoute de son besoin avec bienveillance, et en ayant aussi de la bienveillance dans la manière de l’exprimer.
Merci à vous pour ce partage. Michèle
Bonjour Michèle et bienvenue ! Je vous remercie pour votre feed-back. Effectivement la bienveillance est un mot que j’aime beaucoup. Dans « bienveillance », il y a pour moi beaucoup de douceur… et je fais de la bienveillance une règle dans le cadre des formations que j’anime. Sachant qu’elle est pour moi, une qualité indispensable du coach et au coeur de la relation de coaching. Vous m’avez donné l’envie, Michèle, de retourner lire dans le dictionnaire, la définition du terme « bienveillance ». J’ai trouvé dans le petit Robert « sentiment par lequel on veut du bien à quelqu’un ». Et j’ai envie de compléter ainsi « … ET à soi-même ». A bientôt Michèle 🙂